mercredi 5 décembre 2018

TATYANA M.


Si vous passez un de ces jours en Australie, n'hésitez pas à rendre visite à Tatyana M. Elle est peintre, d'origine russe et mariée à un riche homme d'affaires perpétuellement en déplacement, qui l'a installée dans un luxueux loft du centre de Darwin. Pour la rencontrer, ce n'est pas compliqué : il suffit de fréquenter les bars qui restent ouverts toute la nuit. Si elle n'est pas vautrée sur un coin du zinc, c'est qu'elle est en train de repeindre les chiottes.

Quand j'ai connu Tatyana, nous sommes tombés dans les bras l'un de l'autre. Ce n'était pas à proprement parler un coup de foudre... simplement, nous étions tous les deux pleins comme des valises ! Elle m'a hébergé durant quatre semaines, le temps de faire mon portrait à huile. Ça peut paraitre long, mais il faut savoir qu'elle ne peut peindre qu'avec au minimum un litre de vodka dans la cafetière. Ses mains cessent alors de trembler. Pour ne pas passer pour un goujat auprès d'une personne aussi délicate, j'avais opté pour le même régime.

Nous passions nos journées à picoler. Tous les liquides que nous ingurgitions suffisaient à apaiser nos appétits... tant nourriciers, que sexuels. J'ai d'ailleurs perdu 11 kilos durant cette période. Elle n'avait plus rien à perdre... à part peut-être un os ! La nuit, nous courions de bar en bar, grignotant de-ci de-là quelques cacahuètes égarées et imaginant de nouveaux cocktails plus fulgurants les uns que les autres : Ricard-téquila, whisky-Cointreau, rhum-Get 27... essayez, c'est... heu... ben, justement : fulgurant !

C'est au petit matin que l'inspiration lui venait. Elle se jetait alors comme une furie sur ses pinceaux et ses tubes de couleur. Chacun de ses gestes était comme un coup de griffe sur la toile. Des formes de plus en plus cohérentes apparaissaient comme par magie. Son style pourrait aisément s'apparenter au classique fauvisme, s'il n'était parsemé d'éléments cubistes apportant une certaine gravité à l'ensemble.

Un beau jour, il a bien fallu que je réinvestisse ma panoplie de routard. Monsieur M. avait annoncé son retour et j'avais encore toute l'Australie à découvrir. Si vous avez l'occasion de rencontrer Tatyana M., pourriez-vous lui dire que j'ai oublié ma montre sur le petit guéridon, près du jacuzzi ?

2 commentaires:

  1. Ça c'est la grande vie d'artiste. :) Le jacuzzi... Miss Tatyana ne chômait pas. ;)

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